Aquaculture : un jeune ingénieur camerounais produit 100 tonnes de poissons à partir de son unité

Par Ruben Tchounyabe

Le 2020-08-30

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Aquareign Industry, unité de production du poisson situé à Mfou, une dizaine de km de Yaoundé. Environ 100 tonnes de poissons sortent d’ici pour alimenter des marchés environnants de Mbalmayo, Yaoundé, Ebolowa, et Douala. Le Cameroun consomme plus de 380 000 tonnes de poisson par an dont la moitié fournie par la pêche locale ; le reste importé. C’est donc dans l’idée de réduire cette dépendance en produits halieutiques que Marc Mboule, un jeune camerounais de 27 ans, fais des études en aquaculture et décroche son diplôme d’ingénieur avant de se lancer dans le domaine.

Grâce au financement octroyé par le ministère camerounais de la Jeunesse à travers l’initiative « Plan triennal spécial Jeunes », l’unité a déjà mis en place deux usines et une minoterie qui ravitaille ces poissons en aliments. 10 emplois créés par cette entreprise qui ambitionne d’atteindre 256 tonnes de production annuelle sur une chaîne de valeur complète allant de la production des alevins à la commercialisation.

C’est à Mfou, une bourgade de Yaoundé située à 18 km du centre urbain, que Marc Mboule a installé son unité de production du poisson. Il faut, après une trentaine de minutes en voiture, arpenter la voie qui bifurque derrière le lieudit Scierie pour accéder aux installations de cette unité engluées dans cette forêt qui compte déjà quelques rares maisons d’habitations. Chaque matin, le jeune entrepreneur chausse ses bottes, se couvre de sa blouse floquée aux couleurs d’Aquareign Industry, et s’embourbe dans sa voiture, laissant derrière lui le ronronnement quotidien de la cité-capitale, pour retrouver cet écosystème plutôt calme, « favorable à l’épanouissement des poissons », comme il le souligne. La cinquantaine de bacs faits en bâche et de forme circulaire installés à l’air libre, le château relié à un puits, et les locaux faisant office d’usine révèlent les prémices d’une unité aux allures de future grande industrie.

Entre 500 et 2 000 poissons sortent de chacun des bacs en service, à l’issue du cycle de production qui s’étend généralement sur trois à quatre mois, précise Marius Engolo, technicien aquaculture et responsable de la production. Le silure, espèce la plus demandée sur le marché, selon ce dernier, est la seule qui y est forgée pour l’instant. Le travail ici s’étend sur une chaîne de valeur qui comprend la production des alevins (petits poissons d’un jour), la production des aliments de poissons, le grossissement des poissons, la transformation en fumées de poissons, et la commercialisation. Le deuxième site, à deux cent mètres du premier et qui se dresse majestueusement sur 1 300 m2 donne à voir des infrastructures plus modernes et onéreux. Huit bacs en béton livrent entre 5 000 et 7 000 poissons l’unité, par cycle. La capacité de production peut atteindre 10 000 poissons, souligne le responsable de la production. C’est au total, environ 8 tonnes de poissons de 350 à 400g qui sont produits à tout cycle sur ce site. Entre 100 et 150 tonnes l’an sur l’ensemble des deux sites, note Marc Mboule. Pour obtenir un tel résultat, l’organisation du travail se veut rigoureuse. « Tous les matins, les ouvriers renouvellent l’eau dans les bacs avant de nourrir les poissons. Les groupes électrogènes sont mis à contribution pour transporter de l’eau à partir des deux puits jusqu’aux bacs via des pompes immergés », raconte Marius. Le même geste se répète deux fois par jour.

Un financement de 11 millions de FCFA

C’est la minoterie de l’entreprise installée au lieudit Manassa, à la sortie de la ville de Yaoundé, qui fournit de l’alimentation pour les poissons de cette unité. Ces aliments sont obtenus à partir d’un mélange de farine de poisson, du maïs et du blé auquel on ajoute de temps à autre des médicaments en cas de pathologies. « Le défi à ce stade est d’obtenir des aliments flottants afin de permettre aux poissons de remonter à la surface de l’eau pour les consommer », explique l’entrepreneur âgé de 27 ans qui a très vite compris que le poisson pouvait nourrir son homme, au regard de la quantité importée chaque année au Cameroun. « Nous avions une demande à l’époque qui était de 380 000 tonnes dont la moitié produite par la pêche et le reste importé. Il fallait vraiment travailler pour qu’un domaine comme l’aquaculture puisse résoudre ce problème d’importation », raconte Marc Mboule. C’est ainsi qu’il s’inscrit à l’Institut des sciences halieutiques (ISH) de l’université de Douala dans le but de maîtriser la science, avant de se lancer véritablement dans le domaine en 2017 après sa sortie de l’école. Le jeune ingénieur s’associe à une autre passionnée du secteur pour mettre en place Aquareign Industry qui sera légalisée en 2019.

La structure fraichement créée va aussitôt bénéficier d’apports extérieurs, principalement de l’Etat à travers le Plan triennal spécial jeunes. Grâce à ce financement dont la première partie s’élève à 11 millions de FCFA, l’entreprise va entamer la construction d’un autre site et booster sa production. Les résultats qui vont suivre en quelques années sont encourageants, se réjouit-il. 10 employés dont la tranche d’âge se situe entre 20 et 28 ans y prêtent main forte. « Chaque fois que nous recrutons, nous demandons à ces jeunes de quitter leur domicile familial pour nous rassurer que le poisson nourrit son homme », souligne Marc Mboule qui confesse assurer sa santé, son loyer, sa nutrition, et son bien-être grâce à ce business.

La pandémie de covid-19

Aquareign Industry écoule sa production dans des marchés villes environnantes telles que Mbalmayo, Yaoundé, Ebolowa, et Douala. Des restaurants s’approvisionnent aussi sur place ou se font livrer, selon le promoteur. Tout comme des hôtels dans une moindre mesure, et certains ménages. Mais depuis un moment, la jeune unité de production subit de plein fouet les affres de la crise économique qui secoue la plupart des entreprises suite à la pandémie de covid-19. « Les marchés sont fermés, les restaurants où nous livrons d’habitude n’ont pas su se relever de la crise et notre marché n’est pas assez ouvert, donc du coup nous avons du mal à nous en sortir durant cette période », s’en plaint Marc Mboule. Le niveau des ventes a ainsi chuté, passant de deux tonnes à 300 kg la semaine. « Et là nos revendeuses paient parfois deux semaines après la livraison », lance-il. Mais d’autres stratégies sont annoncées, dans le but d’écouler la production actuelle.

L’entreprise projette de mettre en place une chaîne de valeur complète qui va de la production des alevins à la commercialisation. « Nous voulons passer des 5? production actuelle à 100%, de 100 tonnes à 256 tonnes l’an prochain, avec une écloserie moderne, plus de bacs et plus de points de vente afin de commercialiser un peu plus notre poisson dans le pays. Après, nous allons créer des franchises, donc développer ce projet dans les différentes régions du Cameroun », ambitionne le promoteur. 


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